samedi 6 mars 2010

LE DEJEUNER SUR L'HERBE IMAGINAIRE













Le Déjeuner sur l’herbe de Micheline Hachette, présenté pour la première fois, en 1978 au Palais du Luxembourg dans le cadre du Salon de la Lettre et du Signe, me semble, comme « réinterprétation infinitésimale » représenter une illustration majeure de cette novation par la façon dont elle met en scène des réalités virtuelles et imaginaires à partir d’un monument de l’histoire la peinture. Pour suggérer un tableau aussi célèbre, constituant en soi une rupture dans la peinture du XIXe siècle, si troublant par ce qu’il introduit de mise en abîme d’une thématique débouchant sur une hallucinante ironie, Hachette recourt à des notations-tremplins simples et même prosaïques.

A partir de la disposition d’un pique-nique de supermarché, réduite, sur un plan d’herbe factice, à quelques verres en plastique, des assiettes en carton, plusieurs serviettes de papier à carreaux et des cubes surchargés de notations (ceux-ci figurant la signature de l’artiste et sa présentification), cette oeuvre me semble résoudre opportunément le problème de la perception, obtenue au-delà du concret dans l’imaginaire, par la mutation des sens, fondée sur la substitution d’une représentation par une autre, différente, inconcevable qui, en elle-même, ne s’imposera que comme l’une des expressions envisageables du modèle pris en référence. L’âme des personnages, peints grandeur nature par Manet, plane sur le contexte environnant, suggérée dans la réinterprétation dans le but, me semble-t-il, de rendre présent ce qui, par essence, est absent, mais, en même temps, si présent au travers de cette inédite représentation du célèbre tableau moderne. (Extraits de Murmure de femmes autour du Lettrisme, Anne-Catherine Caron, Il Lettrismo al di là della femminilitudine, Zero Gravita, Sordevolo, 2008.)